Né en 1911 dans une famille d’artistes – son père Ippei était illustrateur, sa mère Kanoko écrivaine – Tarō Okamoto développe très tôt une vision iconoclaste de la création.
Son arrivée à Paris en 1930 marque un tournant décisif : il fréquente l’avant-garde surréaliste tout en s’initiant à l’ethnologie au Musée de l’Homme auprès de Marcel Mauss. Cette double formation, rare pour l’époque, forge sa philosophie artistique résumée par sa célèbre déclaration : « L’art est explosion ».
La guerre interrompt brutalement cette période féconde. Mobilisé en 1942, Okamoto perd toutes ses œuvres d’avant-guerre dans les bombardements de Tokyo. Paradoxalement, cette table rase nourrira son manifeste Anti-tradition (1956) où il appelle à « détruire pour mieux recréer ».
Devenu une figure centrale de l’art japonais d’après-guerre, il influencera toute une génération d’artistes.
Parcours de l’exposition Tarō Okamoto
Les années parisiennes : entre surréalisme et ethnologie
La première section révèle des documents exceptionnels sur le séjour parisien d’Okamoto.
On découvre ses carnets de croquis où se mêlent motifs abstraits et études ethnographiques, témoignant de son immersion simultanée dans deux mondes.
Des photographies inédites le montrent aux côtés de Georges Bataille, dont il partageait la fascination pour le sacré et la transgression.
Le retour au Japon : réinventer la tradition
La seconde partie explore le choc culturel vécu par Okamoto à son retour en 1940. Face à un Japon en ruines, il développe une esthétique unique mariant symboles ancestraux et abstraction moderne. Quatre masques créés en 1970 dialoguent avec des artefacts Jōmon, révélant sa réinterprétation du néolithique japonais.
L’exposition reconstitue partiellement sa série photographique Inori [Prière], document énigmatique sur les rituels populaires de l’après-guerre. Ces images, jamais montrées en France, témoignent de son approche anthropologique de la spiritualité nippone.
L’apogée : la Tour du Soleil et l’Expo ’70
Le clou de l’exposition est consacré à l’Exposition universelle d’Osaka, où Okamoto fut commissaire du pavillon thématique.
Des croquis préparatoires révèlent la genèse de sa Tour du Soleil, sculpture-monument devenue icône de l’événement. Une maquette interactive permet d’explorer les trois niveaux de l’œuvre, dont la « forêt de l’esprit » abritant des centaines d’objets ethnographiques.